[toc]

 

La semaine dernière, les participants des programmes Massa post académiques de Jérusalem ont eu un choc. Ils pensaient assister à une banale conférence sur le leadership juif et le volontariat en Israël; ils se sont retrouvés face à un questionnement identitaire profond. Il faut dire que le conférencier n’était autre que le charismatique Shlomo Balsam. Cet éducateur historique de l’Expérience Israélienne a levé le voile, le temps d’une interview, sur les ingrédients qui rendent ses conférences si savoureuses. Ou comment transmettre à la génération « selfie » le sens du leadership juif en 10 questions.

1. M Balsam, pouvez vous nous retracer les principales étapes de votre parcours ?

Né à Paris en 1948, j’ai été moniteur puis un des dirigeants du mouvement de jeunesse juif sioniste “Bné- Akiva” .Je suis parti en Israel en 1968, après la guerre des Six Jours.

Revenu temporairement en France en 1972, j’ai été professeur à l’école Yabné de Paris dans laquelle j’ai participé à développer une structure d’éducation informelle.

Parallèlement j’ai été un des responsables à l’Ambassade d’Israël à Paris du lien avec les activistes juifs en Union Soviétique où je me suis rendu plusieurs fois. J’ai terminé des études de maîtrise en sciences sociales à la Sorbonne.

De retour en Israël en 1979, j’ai été directeur d’un centre de formation pédagogique à Jérusalem, le Makhon Hizkyaou.

Shlomo BalsamEn 1990, avec l’écroulement du régime communiste dans les pays de l’Est, je deviens directeur éducatif des activités de l’Agence Juive dans les pays de l’ex- bloc soviétique. J’y dirige souvent des stages de formation pour moniteurs et professeurs des organisations juives.

Depuis 1999, je suis guide spécialisé des thèmes juifs en Europe et conférencier dans le domaine des méthodes d’enseignement. Dans ce cadre je prépare des groupes de jeunes au voyage en Pologne et les guide sur les lieux de la vie juive d’avant la Seconde Guerre Mondiale et les camps d’extermination. Je travaille aujourd’hui à Yad Vashem comme guide et intervenant.

2. Pourquoi devient on conférencier pour l’Expérience Israélienne ?

J’ai assisté à la création de l’Expérience Israélienne qui est une filiale de l’Agence Juive dans laquelle j’ai travaillé pendant vingt ans. J’ai été un des premiers guides en Pologne et en Tchéquie pour cette organisation. Je suis donc devenu “naturellement” un intervenant : d’autant plus que l’Expérience Israélienne s’est très vite implantée dans toutes les écoles juives et organisations juives dans le monde et en France pour proposer et réaliser des projets éducatifs.

3. Dans quelles actions associatives êtes vous également engagé ?

Je suis depuis 2009 le président de l’organisation” ALOUMIM”, qui regroupe en Israel les enfants juifs cachés en France pendant la Shoa et comprend près de 1000 membres. Ces rescapés de la Shoah se sont organisés et réalisent beaucoup d’activités culturelles, s’occupent de soutien social et moral, font paraître une revue “Mémoire Vive”.

En savoir plus sur le programme Massa post académique Stagerim

4. Quel était le thème de vos dernières conférence pour les participants des programme Massa Post Collège de Jérusalem ?

J’ai parlé de leadership et de leadership juif. Que doit-on prendre en compte pour pouvoir décider et aider des personnes à prendre des décisions dans la vie. L’importance d’une mémoire collective juive qui peut s’exprimer dans différentes orientations mais qui doit rester une mémoire qui réunit et non qui divise. L’importance d’agir et de réaliser et non seulement de rêver.

Conférence Shlomo Balsam Programmes Massa post Collège 2

5. Pouvez vous nous en révéler les moments forts ?

Je ne fais pas une conférence frontale mais je présente une suite d’activités et d’exercices pendant lesquels les participants peuvent s’exprimer et échanger des idées : il est toujours pour moi très important de voir les jeunes discuter sur des phrases dites par le pédagogue Janusz Korczak que je cite très souvent. Ils devaient “voter” sur différentes phrases définissant un bon éducateur ou leader. C’est pour moi toujours un moment fort.

6. Quels messages souhaitiez vous leur faire passer en priorité ?

Je désire non pas faire passer des messages mais plutôt faire en sorte que tout participant sort de cette rencontre justement avec plus de questions que de réponses. Je veux montrer la responsabilité de savoir poser les bonnes questions en tant que juif et en tant qu’être humain, citoyen du monde. Je suis sioniste, fondamentalement, mais je désire expliquer que ce choix idéologique est lié à des choix difficiles d’engagement et de prise de responsabilité.

Je raconte mes rencontres avec des survivants du génocide rwandais qui m’ont aidé à comprendre la Shoah : je suis un élève d’Emmanuel Levinas qui disait qu’on se découvre toujours dans les yeux de l’Autre. Les rwandais ont compris leur histoire en regardant l’histoire de la Shoah et j’ai compris la Shoah dans leurs yeux.

7. L’initiation de jeunes juifs français au devoir de mémoire, à l’engagement associatif, c’est comment ?

Nous devons aider une génération “selfie” à découvrir le monde et le monde juif. Notre culture juive de solidarité et surtout de mémorisation doit permettre à des jeunes à se construire. Je suis très touché de voir que des jeunes que j’ai guidé en Pologne il y a quelques années et que j’ai retrouvé dans le programme Massa se souvenaient précisément de phrases prononcées pendant le voyage. Beaucoup me disent que ce “plongeon” dans l’Histoire les a consolidé et aidé dans leurs décisions. Oui beaucoup s’engagent réellement.

En savoir plus sur le programme Massa post académique Olami

8. Comment les avez vous trouvé : Plutôt concernés ou peu intéressés ?

Je pense que tous étaient intéressés, et chacun à un moment différent de la rencontre qui en fait une suite de “petites rencontres” dans lesquelles chacun peut se reconnaître à un moment donné.

Qui quand on parle de la Shoah, qui quand on parle de situations politiques, qui quand on parle d’identité juive. La rencontre est construite de telle façon que personne ne peut rester insensible à ce qui se dit. C’est la beauté de ces rencontres où chacun se retrouve à un moment donné devant un miroir.

9. Quel regard portez vous sur les programmes Massa de l’Expérience Israélienne ?

Tous les programmes qui permettent aux participants de s’intégrer à l’Etat d’Israel d’une façon plus facile et humaine sont bienvenus : les programmes Massa permettent d’atténuer les chocs culturels et humains dans l’intégration à un “monde nouveau”.

La réalité israélienne n’est pas simple : les conflits et les guerres, les différences de mentalité, le poids du service militaire, l’importance des idéologies, la vie sociale. Le programme Massa donne une possibilité d’intégration plus “smooth”. Et surtout de découvrir les israéliens et surtout de découvrir leur cœur.

Beaucoup me disent que dans leurs voyages précédents en Israël, ils découvrent les sites historiques comme Massada et Jérusalem, les plages de Natanya mais ils ne pénètrent réellement dans la société israélienne que dans des programmes plus longs comme Massa.

En savoir plus sur le programmes Massa post académique Atzion

10. Le thème de votre prochaine conférence / Livre  ?

J’ai écrit de nombreuses brochures sur l’éducation informelle dans le cadre de l’Agence Juive et publié deux livres sur l’histoire de ma famille pendant la Shoah « Le Baume et la Licorne » et “A la recherche de ces inconnus”. Je prépare un troisième livre sur le parcours de membres de ma famille pendant la Shoah basé sur des documents retrouvés récemment dans des archives.

Je prépare en ce moment des conférences sur la résistance au nazisme par l’éducation, l’importance des éducateurs pour lutter contre le Mal.